Grève des ouvrières des manufactures d’allumettes à Londres en 1888

La grève des ouvrières des manufactures d'allumettes à Londres en 1888 était une grève des femmes et des jeunes filles œuvrant dans la Manufacture Bryant et May de Tower Hamlets, un quartier de l'East End de Londres.


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Grève - Syndicalisme - Terme syndical - Annie Besant

La grève des ouvrières des manufactures d'allumettes à Londres en 1888 était une grève des femmes et des jeunes filles œuvrant dans la Manufacture Bryant et May de Tower Hamlets, un quartier de l'East End de Londres. La grève avait été déclenchée à cause des mauvaises conditions de travail dans la produit d'allumettes, surtout les journées de travail de quatorze heures, les bas salaires, les amendes arbitraires, et les maladies graves génèrées par l'utilisation du phosphore jaune (ou blanc), surtout l'ostéonécrose du maxillaire[1].

La grève

Herbert Burrows et Annie Besant au comité de grève des ouvrières de la manufacture d'allumettes Bryant and May.

Dans un de ses articles dans The Link du 23 juin 1888White Slavery in London», «Esclavage blanc à Londres»), Annie Besant dénonçait les conditions de travail des ouvrières de la manufacture d'allumettes Bryant and May qu'elle avait visitée : des adolescentes qui travaillaient de h 30 à 18 h pour quatre shillings par semaine (soit moins que le loyer d'une seule pièce) et qui ne mangeaient que du pain beurré trempé dans du thé. Les salaires étaient fréquemment amputés à cause des nombreuses amendes imposées par la direction (pour pieds ou vêtements sales par exemple). Enfin, les gaz du phosphore leur pourrissaient les dents et les gencives. Annie Besant voulait faire comprendre à ses lecteurs ainsi qu'aux actionnaires de ce genre d'entreprises les conditions de vie de jeunes filles qui avaient l'âge de leurs propres enfants tandis qu'eux touchaient des «dividendes monstrueux». Elle concluait en appelant au boycott des produits de l'entreprise. Les propriétaires de Bryant and May déclarèrent que l'article n'était qu'un tissu de mensonges et d'inventions et licencièrent les ouvrières qui avaient pu parler à Annie Besant. Ils exigèrent ensuite des autres qu'elles signent un texte qui dénonçait les mensonges de l'article et disait qu'elles étaient particulièrement heureuses dans leur travail. Elles refusèrent. Quant à Annie Besant, elle demanda publiquement pourquoi la direction de l'usine ne l'attaquait pas en diffamation[2], [3].

Le 2 juillet 1888, Annie Besant était présente à un meeting de protestation des allumettières. La grève fut décidée et le 11 juillet, 1 400 ouvrières avaient cessé le travail : leurs conditions ne pouvaient pas être pires, même si, en l'absence de syndicat (alors presque réservé aux hommes), il n'y avait pas de caisse de grève. Annie Besant, Herbert Burrows et la SDF apportèrent leur soutien direct au mouvement alors que les Fabiens apportaient une aide financière. Les journaux se divisèrent : The Times soutint la thèse des patrons alors que les autres crurent l'article d'Annie Besant et les témoignages des ouvrières, d'autant plus que la direction ne pouvait prouver que ces affirmations étaient fausses. Charles Bradlaugh suscita un débat au Parlement sur cette question ; il y fit même recevoir une délégation des grévistes. Devant le mouvement d'opinion publique, la direction de Bryant and May finit par céder. Les jeunes filles licenciées furent réembauchées ; les conditions de travail se perfectionnèrent ; les salaires furent augmentés et les amendes supprimées. Un syndicat fut même créé dans l'entreprise[2], [3], [4].

La campagne contre les allumettes au phosphore jaune

Besant et d'autres continuèrent de faire campagne contre l'utilisation du phosphore jaune pour la fabrication des allumettes.

En 1891, l'Armée du salut avait ouvert sa propre usine d'allumettes dans le district de Bow de Londres, où on utilisait le phosphore rouge moins toxique, et où les salaires étaient plus élevés[1]. Une des raisons de l'ouverture de cette produit d'allumettes était la volonté de perfectionner les conditions de vie des travailleurs à domicile, y compris des enfants, qui plongeaient les allumettes dans des bains à base de phosphore jaune[5]. Plusieurs enfants étaient morts après avoir mangé ces allumettes. Fait intéressant, l'usine d'allumettes de l'Armée du salut affichait un taux d'ostéonécrose du maxillaire inférieur à celui de l'usine Bryant et May dans la même localité, ce qui était dû à le perfectionnement des conditions de travail.

Ces événements avaient fait une mauvaise publicité pour la manufacture de Bryant et May qui annoncèrent en 1901 que leur usine n'utilisait plus de phosphore jaune[1]. Paradoxalement, les propriétaires Francis May et William Bryant, qui étaient tous deux des Quakers, avaient commencé en 1850 par importer des allumettes de sûreté à base de phosphore rouge fabriquées par John Edvard Lundström, en Suède[6]. Cependant, Bryant et May avaient vu leurs ventes d'allumettes de sécurité multipliées par 10 en 1855 et Lundstrom n'a pas été en mesure d'augmenter sa production pour satisfaire à la demande, ils ont par conséquent acquis son brevet pour le royaume uni, et avec son aide, ont construit une usine pour le modèle d'allumettes de sécurité à Bow[6]. Ils ont commencé à utiliser du phosphore rouge en 1855, mais n'ont pas pu rivaliser avec le prix bien plus compétitif des allumettes à base de phosphore jaune d'où le recours au travail des enfants.

L'Armée du salut avait le même problème ; leurs allumettes coûtaient au départ trois fois le prix des allumettes à base de phosphore jaune. Ils n'ont obtenu qu'un succès partiel et seulement parce que énormément de leurs partisans ont refusé d'acheter des allumettes à base de phosphore jaune, ils ont automatisé une grande partie du process de fabrication des allumettes, à l'exception du remplissage, pour faire baisser les coûts, et le recours au travail des enfants dans les métiers dangereux fut interdit. Mais l'usine avait toujours des difficultés à être compétitive sur les prix, et après 1898, le War Cry (journal de l'Armée du Salut) a cessé toute publicité pour leurs allumettes[5]. L'usine de l'Armée du salut finalement fermé et elle a été reprise par Bryant et May, le 26 novembre 1901[7].

En 1908, la Chambre des communes britannique a adopté une loi interdisant l'utilisation de phosphore jaune dans les allumettes après le 31 décembre 1910. Cela fut pour le Royaume-Uni la date d'application de la convention Berne de 1906 sur l'interdiction du phosphore blanc dans les allumettes[7].

La comédie musicale

Dans les années 1960, l'acteur britannique Bill Owen en collaboration avec le parolier Tony Russell a créé une comédie musicale dont le thème était la grève de 1888. La Première du spectacle a été jouée au Globe Théâtre, à Londres, le mardi 1er mars 1966 et un enregistrement d'époque est toujours disponible. Il n'y a jamais plus eu aucune grande production à Londres depuis cette date, quoique la comédie musicale ait été plus tard éditée par Samuel French Ltd en 1979.

La comédie musicale est centrée sur les conditions de vie des coupeuses d'allumettes à l'usine Bryant & May de Bow, à Londres, avec de solides références à la maladie connue sous le nom de «Phossy Jaw» (ostéonécrose de la mâchoire) et le climat politique de l'époque. La majeure partie de l'action se déroule dans un lieu fictif appelé incongrûment "Hope Cour", la comédie dépeint Bryant et May comme des patrons impitoyables et insensibles, et le contremaître de l'usine "M. Mynel" est mis en scène comme un tyran imposant aux filles par la menace un régime de travail forcé.

Le personnage central de la comédie musicale est «Kate», une ouvrière de l'usine logée dans un taudis, qui écrit à «Annie Bessant, pour demander de l'aide pour changer les conditions de travail dans l'usine. L'histoire suit Kate et Annie tentant de mobiliser les filles, Kate apprenant à devenir le leader téméraire de la grève et un acteur clé dans la création et la reconnaissance du syndicat. Il y a également une intrigue secondaire dans laquelle la participation de Kate à la grève crée des tensions dans sa relation avec le docker "Jœ".

Malgré le sujet de la comédie musicale, un accent spécifique est mis sur la mentalité positive et l'exubérance naturelle de ceux qu'on nomme les moineaux cockney, ce qui donne prétexte à de nombreuses scènes de chant et de danse.

Annexes

Bibliographie

Liens externes

Notes et références

  1. Spartacus Educational.
  2. Bennett 1988, p.  41-46
  3. Terrier 2010, p.  134-135
  4. Michèle Perrot, Histoire des femmes tome 4 : le XIXe siècle, Plon, 1991, p. 476-477.
  5. Emsley, 115-126.
  6. Beaver, Part 1 : Building a Business.
  7. Emsley, 125.

Voir aussi

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